Avec près d’un million de postes vacants au Canada, les employeurs doivent se battre pour attirer les talents les plus brillants dans leur organisation.
Mais tous les employeurs ne peuvent pas offrir aux chercheurs d’emploi tout ce qu’ils demandent : des salaires plus élevés, plus d’avantages sociaux et des horaires plus flexibles.
Même ceux qui le peuvent se différencient encore davantage en offrant aux employés une motivation souvent négligée : un lieu de travail à vocation sociale.
À Cheekbone Beauty, la fondatrice et directrice générale, Jenn Harper affirme que son entreprise réussit à attirer des talents en étant transparente au sujet de ses valeurs.
« Les personnes acceptent de travailler pour nous parce qu’elles croient à notre mission et à notre vision », ajoute-t-elle.
« C’est très clair qu’elles travaillent ici parce qu’elles croient à l’autonomisation des jeunes autochtones, autant qu’à la marque… elles sont ici parce qu’elles croient à notre projet. »
Depuis son lancement en 2016, l’entreprise située à St Catharines en Ontario a remis plus de 150 000 $ à des organismes œuvrant pour les jeunes et les femmes autochtones. De plus, elle est la première marque autochtone à établir un partenariat avec le géant de la beauté au détail, Sephora.
L’entreprise explique ouvertement qu’elle n’utilise que du matériel compostable, biodégradable et même parfois en papier ensemencé pour emballer ses cosmétiques; et qu’elle s’approvisionne en ingrédients d’origine végétale, végétaliens et non testés sur les animaux, et produits localement dans la mesure du possible.
Mme Harper affirme que toutes les entreprises devraient inclure un « élément de vocation sociale » à leur plan d’affaires, mais qu’elles ne doivent le faire que de façon authentique et transparente.
À l’agence de marketing et de publicité, basée à Halifax, WeUsThem, le directeur général Ashwin Kutty affirme qu’il a toujours été clair que les entreprises et les organisations associées à des causes sociales n’obtenaient pas le même rayonnement publicitaire que les entreprises privées.
Et, il voulait changer les choses.
Au cours de la dernière décennie, l’entreprise, qui emploie actuellement 22 personnes, a élaboré des campagnes de marketing pour aider des organisations à sensibiliser les gens aux enjeux liés aux maladies mentales, à l’Alzheimer, au cancer du sein, à la pauvreté, à l’itinérance et à la crise du logement.
WeUsThem, qui verse des salaires compétitifs dans le secteur, cherche à remplir deux postes supplémentaires et le fait de pouvoir parler du contenu de leur travail les a encore aidés à recruter.
« Nous pouvons faire une énorme différence et, en tant qu’entreprise à but lucratif, nous pouvons réellement soutenir (financièrement) ces causes », a-t-il dit.
« Même si cela ne nous rapporte pas les milliards de dollars du travail à but lucratif, cela nourrit deux choses : l’âme et le corps. »
M. Kutty affirme que ses employés lui ont confié qu’ils voulaient travailler à l’agence parce qu’ils avaient été personnellement touchés par les causes sociales auxquelles l’entreprise sensibilise le public
L’un des employés, dont un membre de la famille avait récemment reçu un diagnostic de sclérose en plaques, était motivé à participer à cette campagne tandis qu’un autre a déclaré qu’il n’avait jamais autant appris sur la sensibilisation à la santé mentale qu’à l’agence.
Même si ce type de travail peut être extrêmement gratifiant, il ne convient pas à tout le monde, prévient M. Kutty.
« Je les ai avertis qu’il s’agit d’un travail très exigeant qui peut être émotivement éprouvant », a-t-il déclaré.
À Toronto, l’organisme pour la justice alimentaire, FoodShare, a observé une croissance exponentielle de certains segments de ses activités durant la pandémie de COVID-19.
Avant la pandémie, le groupe préparait 300 boîtes de produits frais par semaine et ce chiffre est passé à 3 000 boîtes après le début de la pandémie.
En conséquence, il a dû embaucher rapidement et l’une des façons d’attirer les meilleurs talents a été d’être clair au sujet de sa mission : « construire une ville de Toronto où tout le monde peut se nourrir, nourrir ses proches et sa collectivité dans la dignité et la joie. »
FoodShare œuvre à cette mission de différentes façons à l’interne, notamment en augmentant le salaire minimum de tous ses employés à 24 $ et en publiant l’échelle salariale de tous les employés de l’organisme.
En mars, l’organisme a annoncé qu’il allait commencer à rémunérer les candidats et à leur offrir une compensation pour les tâches effectuées, comme des présentations, dans le cadre du processus d’embauche.
Le groupe élimine les risques de préjugés en supprimant les noms, adresses et âges lors du processus d’embauche et n’accorde pas de crédit supplémentaire à l’éducation par rapport aux compétences vérifiables dans les CV.
La directrice du plaidoyer et des programmes, Katie German, affirme qu’en étant honnête au sujet de ses valeurs, FoodShare montre aux employés actuels et potentiels que l’organisme se soucie d’eux en tant que personnes, et pas seulement en tant qu’employés.
Mme German précise que le temps est révolu où les organismes pouvaient s’en tirer sans, pour ainsi dire, joindre le geste à la parole.
« La pandémie a amené les gens à réfléchir à ce qu’ils voulaient être et à ce qu’ils voulaient faire en général », a-t-elle dit.
Mme German suggère aux employeurs de commencer par mettre en place des politiques de travail plus bienveillantes pour démontrer leur solidarité, surtout pendant la pandémie.
« Il peut s’agir de permettre aux employés de choisir une semaine de travail de quatre jours, d’interdire l’envoi de courriels de travail avant 9 h, après 17 h ou durant le dîner, ou d’accorder plus de jours de congé personnel », ajoute-t-elle.