Depuis que le virus du sida a fait son apparition il y a quarante ans, les soins de santé dispensés aux personnes vivant avec le VIH se sont considérablement améliorés. Ces améliorations ont permis aux personnes concernées de mieux gérer leur santé et de parvenir à se sentir capables de travailler et de subvenir à leurs besoins. Des études ont démontré que le fait de détenir un emploi permet d’améliorer la santé mentale et la santé physique des personnes vivant avec le VIH. Néanmoins, le chômage reste un problème persistant chez les personnes vivant avec le VIH, et ce pour plusieurs raisons :
Nous nous sommes entretenus avec Christian Hui pour savoir comment les employeurs, les collègues et les autres parties prenantes peuvent davantage aider les personnes vivant avec le VIH à trouver et à maintenir un emploi intéressant, et comment nous pouvons les soutenir au travail et en dehors du travail.
Hui est depuis longtemps un fervent défenseur de la communauté VIH. Il se décrit comme un pionnier vivant avec le VIH, et utilise les pronoms « il/eux ». Il a obtenu son baccalauréat (16) et sa maîtrise en service social (17) à Toronto Metropolitan University (TMU) et termine actuellement son doctorat en études des politiques à TMU.
En s’appuyant sur ses expériences personnelles avec le VIH, sa formation dans le domaine du travail social et son doctorat en études politiques, Hui propose d’utiliser le suivi communautairepour évaluer les politiques et les programmes canadiens qui ont une incidence sur les personnes vivant avec le VIH.
Le suivi communautaire est un concept relativement nouveau qui permet aux personnes les plus touchées par les politiques ou les programmes gouvernementaux en cours de planification de se prononcer sur les critères d’évaluation de ces politiques. Ces groupes peuvent ainsi faire en sorte que le gouvernement tienne ses promesses, et que les meilleurs résultats possibles soient obtenus.
Hui est également conseiller communautaire mondial principal auprès de Prevention Access Campaign, une organisation non gouvernementale internationale qui est le fer de lance de la campagne internationale Undetectable=Untransmittable (U=U), et cofondateur de deux réseaux indépendants de personnes vivant avec le VIH, à savoir : Ontario Positive Asians et Canadian Positive People Network.
Mettre fin à la discrimination liée au VIH : la campagne U=U donne aux personnes vivant avec le VIH les moyens de réussir dans le domaine professionnel
La campagne U=U vise à faire connaître un fait largement méconnu : les personnes vivant avec le VIH qui suivent un traitement et dont la charge virale est indétectable ne peuvent pas transmettre le VIH par voie sexuelle. La campagne avait pour objectif de mettre fin à la double épidémie du VIH et de la stigmatisation liée au VIH, en fournissant aux personnes vivant avec le VIH des informations précises et pertinentes sur leur santé, tant sur le plan social que sur le plan sexuel et reproductif. Un grand nombre de personnes vivant avec le VIH sont capables de maintenir un emploi intéressant et peuvent profiter des avantages liés à l’emploi, ce qui non seulement accroît leur sécurité économique, mais leur permet également d’établir des liens sociaux et de trouver une meilleure raison d’être.
Le rapport The Employment Change and Health Outcomes Study (ECHO) a montré que le fait d’avoir un emploi contribue à une meilleure santé physique et mentale chez les personnes vivant avec le VIH. En plus de fournir un revenu régulier, un emploi permet de structurer la journée, de favoriser des contacts réguliers avec des personnes autres que les membres de la famille, d’établir un lien avec des objectifs de plus grande envergure et d’encourager la pratique d’une activité régulière. Cependant, la discrimination en matière d’emploi est souvent le lot de nombreuses personnes vivant avec le VIH. Quarante-deux pour cent des participants à l’étude ont déclaré avoir été victimes de discrimination en matière d’emploi, principalement en raison de leur statut VIH, de leur orientation sexuelle ou de leur origine ethnique.
Inclusion et accessibilité en milieu de travail
Hui affirme que si les organisations cherchent à être inclusives et accessibles, elles doivent réfléchir à la manière de répondre aux besoins des personnes qui vivent avec des handicaps invisibles. Mais tout commence par une meilleure éducation, qui peut également servir à atténuer la stigmatisation. Selon Hui, il est primordial que les organisations disposent de connaissances et de formations sur le VIH, afin de pouvoir réviser leurs politiques et veiller à ce que leur équipe des ressources humaines sache comment soutenir les personnes vivant avec cette maladie chronique.
Hui ajoute également que le VIH est encore souvent considéré comme un sujet tabou dont on ne parle pas sur le lieu de travail. De ce fait, les personnes vivant avec le VIH ont le sentiment de devoir cacher leur état à leurs collègues, et de ne pas pouvoir révéler leur vrai visage sur leur lieu de travail. Pour contribuer à réduire la stigmatisation, les organisations doivent prendre l’initiative de parler du VIH et d’attirer l’attention sur ce sujet. Cela peut aider les employés à se sentir plus à l’aise pour dévoiler leur état de santé.
De nombreuses personnes vivant avec le VIH ont parfois été absentes du marché du travail pendant un certain temps et ont donc besoin d’aide pour réintégrer le marché du travail. Selon Hui, les possibilités de travail à temps partiel ou les initiatives de recyclage professionnel sont un excellent moyen d’aider les personnes vivant avec le VIH à réintégrer le marché du travail. Il précise également qu’il peut être utile pour ces personnes d’observer le travail d’autres collègues, car il se peut qu’elles ne sachent même pas quel travail les intéresse. L’observation en situation de travail est un excellent moyen d’apprendre et de déterminer ce qui convient le mieux à une personne.
Le module de Fierté au travail Canada vise à créer des lieux de travail accueillants pour les personnes atteintes du VIH/sida
Hui a indiqué que les entreprises doivent être mieux informées sur le fait de vivre avec le VIH afin de pouvoir réviser leurs politiques en fonction des besoins, et devenir plus inclusives. Il cite un module sur le VIH/sida en milieu de travail élaboré par Jade Pichette pour Fierté au travail,qui constitue un excellent point de départ pour les employeurs et les entreprises.
Pichette (« ils/eux ») est un spécialiste de l’inclusion, de la diversité, de l’équité et de l’accessibilité (IDEA!) basée à Tkarón:to/Toronto. Jade occupe actuellement le poste de directeur des programmes à Fierté au travail Canada, où il travaille avec plus de 250 grands employeurs à travers le Canada sur l’inclusion de l’expression de genre, de l’identité de genre et de l’orientation sexuelle.
Pichette indique : « J’ai développé un module sur l’intégration du VIH/SIDA en milieu de travail. Je voulais soulever la question de l’intégration sur le lieu de travail des personnes vivant avec le VIH/sida, car les employeurs hésitent à aborder le sujet. Rares sont les personnes qui se sentent suffisamment en sécurité pour révéler leur état de santé sur leur lieu de travail, et un grand nombre d’entre elles sont confrontées à la stigmatisation et aux commentaires négatifs à l’égard des personnes vivant avec le VIH. Le module avait donc pour but d’impliquer les employeurs dans cette discussion ».
Pichette ajoute : « Le module était offert à tous les membres de Fierté au travail Canada; toutefois, une présentation peut également achetée. La séance permettra de mieux comprendre comment créer un lieu de travail accueillant pour les personnes atteintes du VIH/sida, sans oublier les changements qui pourront être apportés aux politiques et aux processus ».
Si vous souhaitez commander les modules, veuillez envoyer un courriel à l’adresse suivante : info@prideatwork.ca.
Agir pour soutenir les personnes vivant avec le VIH/sida
Hui ajoute que les organisations peuvent s’associer à des organisations à but non lucratif de lutte contre le VIH, ou les soutenir, car elles effectuent un travail important au sein de la communauté pour venir en aide aux personnes vivant avec le VIH.
« Très souvent, les défis auxquels nous sommes confrontés sont liés à la stigmatisation et au manque d’éducation concernant les personnes vivant avec le VIH, et rares sont les personnes qui en parlent, en particulier sur le lieu de travail », explique Hui. « Il est important de continuer à renforcer la sensibilisation et d’entretenir ces conversations, non seulement à l’occasion de la Journée mondiale du sida, mais aussi tout au long de l’année ».
Cela permet de réduire la stigmatisation et d’aider les employés à se sentir suffisamment à l’aise pour révéler leur état de santé sur leur lieu de travail.
Il est évident que vivre avec le VIH est un parcours incroyablement complexe qui mène souvent à l’isolement. Pour faire en sorte que les personnes vivant avec le VIH puissent accéder à des soins de santé et à des emplois de qualité, il est essentiel que les organisations s’efforcent d’éradiquer la stigmatisation associée au VIH, de décoloniser les systèmes de soins de santé et de créer des lieux de travail plus inclusifs. Selon Hui, un tel objectif peut être atteint en fournissant des informations et des ressources aux employeurs, en soutenant les organisations à but non lucratif de lutte contre le VIH et en entretenant des conversations régulières sur le VIH, tant sur le lieu de travail que dans d’autres contextes. Une telle approche permettra de créer un environnement d’acceptation et de compréhension, qui aidera les personnes vivant avec le VIH à se sentir suffisamment en sécurité pour révéler leur vrai visage.
Si vous souhaitez soutenir la campagne mondiale U=U, vous pouvez faire un don à Prevention Access Campaign.